La violoniste Marina Chiche joue pendant les répétitions.

Le lundi 22 juin 2020, les équipes de l'Établissement de Communication et de Production Audiovisuelle de la Défense (ECPAD) ont filmé le concert traditionnel du Gouverneur Militaire de Paris, dans la cour des Invalides, assuré par la Musique de l'Air, et accompagnée par la violoniste Marina Chiche.

Concert du GMP en ligne

Sur la chaîne YouTube du GMP – Gouverneur Militaire de Paris
Diffusion du concert caritatif enregistré dans la Cour d’Honneur des Invalides
où j’ai joué en soliste avec la musique de l’Air, dir. Claude Kesmaecker
Au programme : JS Bach, Massenet, Saint-Saens

Le concert a été enregistré pour récolter des dons et apporter du soutien aux militaires blessés ainsi qu’à leurs familles et à celles des militaires décédés.

=> Pour faire un don, c’est ici 🙏


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5 étoiles ⭐ de Classica pour 📀 Post-scriptum

5 étoiles 🌟de Classica qui illuminent notre CD Post-Scriptum paru chez NoMadMusic

🙏Merci à Michel Le Naour de ces mots :
« Marina Chiche, soutenue par Aurélien Pontier, ne se contente pas de la démonstration technique mais livre une interprétation où le lyrisme à fleur de peau, l’élégance Mitteleuropa, la nostalgie le disputent à la tendresse …»

Pour écouter Post-scriptum, c’est ici : https://smarturl.it/m0oy94

#50 – Sisyphe ou la condition de musicien

#50 - Sisyphe ou la condition de musicien
Une histoire de violoncelliste, de Bach et...de temps long !

✍️Liens 

« Atelier de Marina » sur Facebook – tous les Vendredis de 18H à 18H45 sur ma page Marina Chiche – violoniste
Un rendez-vous informel où je vous ouvre les portes de ma salle de travail ! 

Chers amis,

 

après Leonard Bernstein et Nadia Boulanger la semaine dernière, j’ai envie de vous parler d’un autre immense artiste, qui brille fort au panthéon des musiciens du XXe siècle !

 

Il s’agit du violoncelliste espagnol, Pablo Casals. (1876-1973)

 

Cet immense artiste a marqué son temps et a traversé le XXe siècle … dans toute sa complexité.

 

Un musicien plus que complet, aux connaissances encyclopédiques, qui n’a pas hésité à agir selon un engagement politique sans compromis, contre le franquisme et toute forme de fascisme.

Sa mémoire reste fortement attachée à son festival à Prades, créé dans les années 50, où les plus grands musiciens du monde entier venaient le retrouver « chez lui » pour faire de la musique ensemble. 

Bien sûr, comment ne pas évoquer sa version légendaire des Suites pour violoncelle de JS Bach. 

Ecoutez-plutôt !

Mais pourquoi pensais-je à Casals ces jours-ci ?

Musicien - Profession ?

Lors d’une interview cette semaine, on me posait la question de mon rapport à ma « profession »… le temps consacré à ma vie professionnelle par rapport à ma vie personnelle.
Vaste sujet

Il y a plus d’un an j’avais d’ailleurs écrit un article sur mon blog intitulé « Profession – Musicien« . 

Et je concluais ainsi :

 » Musique :
passion, vocation ou profession ? 

Oui, la musique peut être un métier. Il y a un aspect économique. 
Il y a aussi l’aspect de labeur, d’exercice, de quotidienneté de la pratique. Donc métier, comme remettre chaque jour sur le métier son savoir-faire.

C’est aussi un travail, un job
Une profession – aussi comme une profession de foi. Une pratique de dépassement de soi.

On pourrait dire aussi que c’est un métier-vocation. 

J’aime beaucoup le fait qu’en allemand il y ait un lien étymologique si clair entre Beruf (métier, profession) et Berufung (vocation). 

Faire de sa vocation sa profession ?

Une contradiction, parfois…Une bénédiction, souvent ! « 


Alors oui, la question n’est pas anodine pour un musicien. Profession, vocation mais aussi réalisation dans le temps…

Le temps long d'une maturation artistique

Car un aspect que l’on oublie souvent de dire et de percevoir pour la vie d’un musicien, c’est que son développement s’inscrit dans un temps long –  à la différence de certains sports ou disciplines.

C’est d’ailleurs un processus parfois à contre-courant de la fascination provoquée par le phénomène de prodige, de la précocité

Cette « maladie généralement fatale » comme le disait le violoniste Jascha Heifetz, dont il disait avoir échappé de justesse !

Il en existe de nombreux cas assez tragiques…
Le prodige exposé comme au cirque, dans une logique de performance a souvent du mal à se développer… (je vous en parlerai une prochaine fois ! )

On est loin de l’acte d’interprétation, d’un phénomène de maturation, artistique ou technique d’ailleurs.

Vieillir comme un bon vin...

Le parcours de Casals montre justement un cheminement, une carrière inscrite dans le temps long (il jouait encore à plus de 90 ans), un processus de révélation, d’expansion. 

Casals, musicien au talent protéiforme,  jouait chaque matin au piano un prélude et une fugue du Clavier bien tempéré, de Bach, puis, au violoncelle, l’une des six Suites.

Il existe une anecdote célèbre. 

Quand on demanda à la fin de sa vie à Casals pourquoi il continuait à « practice » (travailler), il répondit : 

« Because I have the feeling I am still making progress. »

Parce que j’ai l’impression de continuer à faire des progrès !

Impressionnant à plus de 90 ans 

Même si – entre nous – je suis convaincue de l’impact positif de la pratique musicale, aspect documenté d’un point de vue des neurosciences (on parle de neuro-plasticité et même neuro-génèse !)

Au-delà de la routine, le chemin !

La philosophie de Casals incarne tellement l’essence de cette quête asymptotique du musicien, une quête infinie …

N’est-ce pas bouleversant d’imaginer cet homme remettre chaque jour sa pratique sur l’établi, avec l’humilité d’un « artisan d’art » ?

Et ainsi transformer cette pratique qui peut être vécue parfois comme une contrainte, un fardeau, une malédiction, en bénédiction, en instrument de liberté et d’expansion.

Mais ce dont parle Casals, c’est bien plus qu’une routine !
D’ailleurs… je n’avais jamais remarqué mais la routine ne serait-ce pas une petite route (n’est-ce pas ?!), un sillon déjà tracé par l’habitude ?

Auquel on pourrait opposer le chemin au sens le plus noble du terme, celui du « dao/tao » (le chemin spirituel) ou « michi »(en japonais). On retrouve le caractère chinois du dao dans plusieurs disciplines comme le ju-do…(la « voie » de…)

Sisyphe, ce musicien !

L’histoire de Casals et de son rituel matinal m’a fait penser au Sisyphe de Camus.

Chaque matin reprendre l’ascension de sa montagne et faire rouler son rocher, à bout de bras, en sachant qu’une fois en haut, le rocher dévalerait fatalement la pente….tâche infinie…

Et pourtant…
« La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d’homme », nous dit Camus.

Eh bien, maintenant j’en suis convaincue. Sisyphe devait être musicien !

«Toute la joie silencieuse de Sisyphe est là. Son destin lui appartient. Son rocher est sa chose»

Et vous, quel rocher portez-vous en haut de votre montagne chaque jour ?  

P.-S.1:  

Merci mille fois pour vos messages qui me vont droit au coeur ! Je vous réponds dès que possible … la période est riche en projets dont j’ai hâte de pouvoir vous parler prochainement !

P.-S.2:

J’espère que vous et vos proches vous portez bien, que le déconfinement progressif ouvre de nouvelles perspectives !

 

Très affectueusement,

Marina 🎻

🎬 

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#49 – I had a dream…

#49 - I had a dream...
Une histoire d'Amérique, de médiation et...d'atelier !

✍️Quelques liens d’interview
ITW France Musique Musique Matin : j’étais l’invitée de la Matinale pour parler de l’Atelier sur Facebook et de la musique sur les supports numériques !

Chers amis,

cette semaine j’ai envie de vous parler de musiciens qui parlent !

Car oui, cela existe… et cela a existé !

Souvent j’entends dire que les musiciens ne prennent pas la parole ou n’aiment pas la prendre… 
Bien sûr, il existe cette idée que c’est dans l’au-delà des mots que se situe le discours musical et que donc le musicien, de fait, ne s’exprimerait vraiment qu’à travers son instrument, à travers l’œuvre qu’il joue.
 
Lors des récitals « traditionnels », il y a ce rituel de l’artiste muet, lointain sur la scène sur son piédestal. 
Impossible d’imaginer sa voix, excepté peut-être si elle ou il annonce un « bis » à a fin. 
Et encore, souvent…on n’entend rien et tout le public se met à murmurer  : « Qu’est-ce qu’il/elle a dit ? »  

L’idée qu’un musicien ne soit pas supposé parler m’a d’ailleurs longtemps gênée dans mes études de musicologie que j’avais l’impression de mener en cachette, de manière transgressive.

Pourquoi avais-je toujours besoin de mettre des mots sur la musique et sur mon expérience musicale ? 
Pourquoi avais-je ce besoin de lire sur la musique et les compositeurs, et de vouloir « conceptualiser » des choses ?
Le violon aurait dû largement me suffire…  

Bien sûr, rien ne pouvait (et ne peut !) remplacer l’expérience du concert, la magie d’une communication et d’une communion avec le public autour d’une œuvre aimée.

Et pourtant…
Dès les premiers séminaires que je donnais à Sciences Po (il y a plus de dix ans maintenant !), quelle joie !  
Voir les yeux de mes étudiants briller en s’ouvrant à des œuvres comme le Sacre du Printemps de Stravinsky ou la Pastorale de Beethoven.

Ou à la fin d’un concert-lecture où je joue et présente des œuvres comme dans mon programme Violon+, des spectateurs aux Flâneries musicales de Reims venant me dirent qu’ils ont l’impression d’entendre « mieux » ! 





Alors, aujourd’hui j’aimerais vous parler de deux musiciens que je fréquente assidûment en ce moment, deux exemples extraordinaires de « musiciens qui parlent » !

Le premier est un immense chef, compositeur, pianiste américain. Je vous en parlais déjà la semaine dernière dans ma lettre « Who is the boss ? ».
Vous vous souvenez ?

Leonard Bernstein (1918-1990)

Oui, c’est bien lui !
Je vous racontais le grand Lenny prenant justement la parole lors d’un concert à Carnegie Hall pour faire un « disclaimer » avant de diriger le 1er concerto de Brahms avec Glenn Gould en soliste.

Eh bien…j’ai passé les derniers jours avec lui… en réécoutant ses fameuses Lectures à Harvard

The unanswered question

Les lectures à Harvard données par Bernstein sont cultes et un exemple ultime de ce qui peut se faire comme communication sur la musique

Cette série de conférences fut le résultat d’une année passée en résidence sur le campus. Bernstein devait y habiter, y encadrer les travaux de certains étudiants et donc donner un cycle de six conférences publiques.  

A l’automne 1972 Bernstein arriva donc sur place. C’était un « Harvard boy » lui-même – il était à la maison. De plus sa fille était à la même époque, au Radcliffe College, « l’annexe féminine » de Harvard…

Incroyable expérience… il fut si populaire sur le campus qu’il fut désigné « Man of the year » par les étudiants.

Un des aspects les plus fascinants de l’approche de Bernstein, outre son charisme absolu, c’est la dimension interdisciplinaire qu’il insuffla à ses « lectures ».

Un des points d’appui pour créer un système de références pour Bernstein est la linguistique. Il cite régulièrement Noam Chomsky.
Pour résumer rapidement, Il file la métaphore de la musique comme langage en déclinant :

  • phonologie (son)
  • syntaxe (structure)
  • sémantique (signification)

Mais bien sûr, son propos va bien au-delà.

Outre la pertinence et la légitimité de cette métaphore d’un point de vue des théories musicales historiques, Bernstein produit un dénominateur commun d’une puissance extraordinaire et rend l’élaboration de son propos compréhensible, tangible pour tous. Une vraie accessibilité…

"Mademoiselle" Boulanger (1887-1979)

L’autre immense artiste avec laquelle je passe beaucoup de temps en ce moment et dont je veux vous toucher mot, c’est Nadia Boulanger (1887-1979).

Oui, j’ai de drôles de fréquentations…

Nadia Boulanger, cette femme exceptionnelle qui traversa le XXe siècle fut parfois appelée l’autre « mademoiselle » avec Coco Chanel.

Son impact sur le monde musical fut énorme :
compositrice au début de sa vie, elle fit une immense carrière de pédagogue de la musique. Presque tous les compositeurs du XXe passèrent dans sa classe ou lui demandèrent conseil. La liste est infinie d’Igor Stravinsky à Aaron Copland en passant par Astor Piazzolla ou Philip Glass.

Nadia Boulanger mena aussi une carrière étonnante de cheffe d’orchestre, à une époque où diriger des orchestres (essentiellement masculins) était impensable…
Elle fut par exemple la première femme à diriger le Boston Symphony Orchestra ..

Pourquoi je vous parle de la grande Nadia ?

D’abord parce que je suis en train de co-écrire un podcast sur elle pour une Université américaine. Et cette plongée dans des archives d’université américaine est passionnante.

Mais à l’instar de Bernstein, Nadia était une grande communicante sur la musique. Ou plutôt : Bernstein, à l’instar de Nadia Boulanger, devrais-je dire !!

En effet, toute sa vie, elle donna des conférences sur la musique. D’ailleurs dans les années 1937-38 elle fit escale à Harvard pour donner des « lectures » publiques sur les cantates de Bach ou sur les sonates et quatuors de Beethoven.
Pendant la 2e Guerre mondiale, elle enseignera d’ailleurs à temps plein aux Etats-Unis. 

Dernier clin d’oeil, elle eut une relation d’amitié avec Lenny Bernstein, qui, bien plus jeune qu’elle, s’inclinait avec admiration et respect devant Mademoiselle. 
 

j’aurais plein de choses à vous raconter sur la grande Nadia Boulanger et je le ferai dans un prochain article, promis ! 

L'incarnation de la médiation

Pour revenir à mon propos du jour, que ce soit avec Lenny Bernstein ou Nadia Boulanger, ce qui frappe dans ces médiations incarnées, c’est  :

  • la capacité à créer des liens, des résonances à travers l’histoire de la musique et entre les arts.
  • l’inventivité pour créer ces dénominateurs communs, et le maniement virtuose de ce que j’aime appeler l‘art de la métaphore ! 
  • et aussi, cet enthousiasme musical, une musique vécue comme quelque chose d’existentiel.

Comment ne pas être médusé, captivé, emporté par leurs explications ?

A force de « passer du temps » avec eux…

I had a dream…


A quoi ressemblerait une telle conférence de nos jours ? 

Comment arriver à transmettre un discours qui rende des choses parfois complexes – possibles à appréhender par le plus grand nombre – sans jamais dénaturer le propos et l’ambition artistique ? 

Et si on pouvait retrouver ou réinventer cette manière de parler de la musique ?

D’ailleurs l’enjeu, comme dans toute forme de médiation, n’est sans doute pas de faire comprendre mais de rendre sensible, de donner à percevoir !

Je me souviendrai d’ailleurs toujours des mots que me dit la brillante compositrice britannique Rebecca Saunders l’été dernier.

Rebecca Saunders a été la première femme compositrice à recevoir le Ernst von Siemens Preis en 2019 : énorme marque de reconnaissance, on dit parfois que c’est le Prix Nobel de la musique ( prix doté de 250 000 euros ;-).  

Notre rencontre eut lieu à Paris à l’IRCAM, une interview que j’écrivais pour le magazine Transfuge.

Après un long moment d’échange, elle me dit soudain (en anglais):
 » Vous savez, souvent les gens pensent qu’il y a quelque chose à comprendre quand ils entendent une musique. Mais c’est un malentendu. Ce qui compte, c’est la curiosité et l’ouverture à recevoir quelque chose de nouveau.« 

Eh bien, il me semble que l’acte de prendre la parole en tant que musicien, c’est précisément d’aller au bout de la mission de l’interprète, au sens d’être un intermédiaire

La prise de parole sert alors l’objectif qui est de susciter la curiosité chez le public, de provoquer sa disponibilité et par là même, de créer les conditions de réception !

Et vous, qu’en pensez-vous ? 

P.-S.1:  

Suite à de nombreux messages, j’ai décidé de poursuivre l’aventure de l’Atelier – mais à un rythme hebdomadaire !
Si vous voulez me rejoindre, je serai en direct sur Facebook. De 18H à 18H30 les Vendredi ! 

En plus, du Facebook Live, les épisodes sont aussi disponibles en replay.

P.-S.2:

J’espère que vous et vos proches vous portez bien, que le déconfinement apporte prudemment l’oxygène, dont nous avons tous tant besoin !

 

Très affectueusement,

Marina 🎻

🎬 

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