#50 – Sisyphe ou la condition de musicien

#50 - Sisyphe ou la condition de musicien
Une histoire de violoncelliste, de Bach et...de temps long !

✍️Liens 

« Atelier de Marina » sur Facebook – tous les Vendredis de 18H à 18H45 sur ma page Marina Chiche – violoniste
Un rendez-vous informel où je vous ouvre les portes de ma salle de travail ! 

Chers amis,

 

après Leonard Bernstein et Nadia Boulanger la semaine dernière, j’ai envie de vous parler d’un autre immense artiste, qui brille fort au panthéon des musiciens du XXe siècle !

 

Il s’agit du violoncelliste espagnol, Pablo Casals. (1876-1973)

 

Cet immense artiste a marqué son temps et a traversé le XXe siècle … dans toute sa complexité.

 

Un musicien plus que complet, aux connaissances encyclopédiques, qui n’a pas hésité à agir selon un engagement politique sans compromis, contre le franquisme et toute forme de fascisme.

Sa mémoire reste fortement attachée à son festival à Prades, créé dans les années 50, où les plus grands musiciens du monde entier venaient le retrouver « chez lui » pour faire de la musique ensemble. 

Bien sûr, comment ne pas évoquer sa version légendaire des Suites pour violoncelle de JS Bach. 

Ecoutez-plutôt !

Mais pourquoi pensais-je à Casals ces jours-ci ?

Musicien - Profession ?

Lors d’une interview cette semaine, on me posait la question de mon rapport à ma « profession »… le temps consacré à ma vie professionnelle par rapport à ma vie personnelle.
Vaste sujet

Il y a plus d’un an j’avais d’ailleurs écrit un article sur mon blog intitulé « Profession – Musicien« . 

Et je concluais ainsi :

 » Musique :
passion, vocation ou profession ? 

Oui, la musique peut être un métier. Il y a un aspect économique. 
Il y a aussi l’aspect de labeur, d’exercice, de quotidienneté de la pratique. Donc métier, comme remettre chaque jour sur le métier son savoir-faire.

C’est aussi un travail, un job
Une profession – aussi comme une profession de foi. Une pratique de dépassement de soi.

On pourrait dire aussi que c’est un métier-vocation. 

J’aime beaucoup le fait qu’en allemand il y ait un lien étymologique si clair entre Beruf (métier, profession) et Berufung (vocation). 

Faire de sa vocation sa profession ?

Une contradiction, parfois…Une bénédiction, souvent ! « 


Alors oui, la question n’est pas anodine pour un musicien. Profession, vocation mais aussi réalisation dans le temps…

Le temps long d'une maturation artistique

Car un aspect que l’on oublie souvent de dire et de percevoir pour la vie d’un musicien, c’est que son développement s’inscrit dans un temps long –  à la différence de certains sports ou disciplines.

C’est d’ailleurs un processus parfois à contre-courant de la fascination provoquée par le phénomène de prodige, de la précocité

Cette « maladie généralement fatale » comme le disait le violoniste Jascha Heifetz, dont il disait avoir échappé de justesse !

Il en existe de nombreux cas assez tragiques…
Le prodige exposé comme au cirque, dans une logique de performance a souvent du mal à se développer… (je vous en parlerai une prochaine fois ! )

On est loin de l’acte d’interprétation, d’un phénomène de maturation, artistique ou technique d’ailleurs.

Vieillir comme un bon vin...

Le parcours de Casals montre justement un cheminement, une carrière inscrite dans le temps long (il jouait encore à plus de 90 ans), un processus de révélation, d’expansion. 

Casals, musicien au talent protéiforme,  jouait chaque matin au piano un prélude et une fugue du Clavier bien tempéré, de Bach, puis, au violoncelle, l’une des six Suites.

Il existe une anecdote célèbre. 

Quand on demanda à la fin de sa vie à Casals pourquoi il continuait à « practice » (travailler), il répondit : 

« Because I have the feeling I am still making progress. »

Parce que j’ai l’impression de continuer à faire des progrès !

Impressionnant à plus de 90 ans 

Même si – entre nous – je suis convaincue de l’impact positif de la pratique musicale, aspect documenté d’un point de vue des neurosciences (on parle de neuro-plasticité et même neuro-génèse !)

Au-delà de la routine, le chemin !

La philosophie de Casals incarne tellement l’essence de cette quête asymptotique du musicien, une quête infinie …

N’est-ce pas bouleversant d’imaginer cet homme remettre chaque jour sa pratique sur l’établi, avec l’humilité d’un « artisan d’art » ?

Et ainsi transformer cette pratique qui peut être vécue parfois comme une contrainte, un fardeau, une malédiction, en bénédiction, en instrument de liberté et d’expansion.

Mais ce dont parle Casals, c’est bien plus qu’une routine !
D’ailleurs… je n’avais jamais remarqué mais la routine ne serait-ce pas une petite route (n’est-ce pas ?!), un sillon déjà tracé par l’habitude ?

Auquel on pourrait opposer le chemin au sens le plus noble du terme, celui du « dao/tao » (le chemin spirituel) ou « michi »(en japonais). On retrouve le caractère chinois du dao dans plusieurs disciplines comme le ju-do…(la « voie » de…)

Sisyphe, ce musicien !

L’histoire de Casals et de son rituel matinal m’a fait penser au Sisyphe de Camus.

Chaque matin reprendre l’ascension de sa montagne et faire rouler son rocher, à bout de bras, en sachant qu’une fois en haut, le rocher dévalerait fatalement la pente….tâche infinie…

Et pourtant…
« La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d’homme », nous dit Camus.

Eh bien, maintenant j’en suis convaincue. Sisyphe devait être musicien !

«Toute la joie silencieuse de Sisyphe est là. Son destin lui appartient. Son rocher est sa chose»

Et vous, quel rocher portez-vous en haut de votre montagne chaque jour ?  

P.-S.1:  

Merci mille fois pour vos messages qui me vont droit au coeur ! Je vous réponds dès que possible … la période est riche en projets dont j’ai hâte de pouvoir vous parler prochainement !

P.-S.2:

J’espère que vous et vos proches vous portez bien, que le déconfinement progressif ouvre de nouvelles perspectives !

 

Très affectueusement,

Marina 🎻

🎬 

  • Cet article vous a plu ?

Partagez-le 😃

  • Vous avez des réactions ? 

Parlons-en dans les commentaires du blog ! Je les lis tous ! ✍️
ou
écrivez-moi à : info@marina-chiche.com 
 

  • On vous a fait suivre l’e-mail et vous voulez vous inscrire, c’est 👉 ici 

#49 – I had a dream…

#49 - I had a dream...
Une histoire d'Amérique, de médiation et...d'atelier !

✍️Quelques liens d’interview
ITW France Musique Musique Matin : j’étais l’invitée de la Matinale pour parler de l’Atelier sur Facebook et de la musique sur les supports numériques !

Chers amis,

cette semaine j’ai envie de vous parler de musiciens qui parlent !

Car oui, cela existe… et cela a existé !

Souvent j’entends dire que les musiciens ne prennent pas la parole ou n’aiment pas la prendre… 
Bien sûr, il existe cette idée que c’est dans l’au-delà des mots que se situe le discours musical et que donc le musicien, de fait, ne s’exprimerait vraiment qu’à travers son instrument, à travers l’œuvre qu’il joue.
 
Lors des récitals « traditionnels », il y a ce rituel de l’artiste muet, lointain sur la scène sur son piédestal. 
Impossible d’imaginer sa voix, excepté peut-être si elle ou il annonce un « bis » à a fin. 
Et encore, souvent…on n’entend rien et tout le public se met à murmurer  : « Qu’est-ce qu’il/elle a dit ? »  

L’idée qu’un musicien ne soit pas supposé parler m’a d’ailleurs longtemps gênée dans mes études de musicologie que j’avais l’impression de mener en cachette, de manière transgressive.

Pourquoi avais-je toujours besoin de mettre des mots sur la musique et sur mon expérience musicale ? 
Pourquoi avais-je ce besoin de lire sur la musique et les compositeurs, et de vouloir « conceptualiser » des choses ?
Le violon aurait dû largement me suffire…  

Bien sûr, rien ne pouvait (et ne peut !) remplacer l’expérience du concert, la magie d’une communication et d’une communion avec le public autour d’une œuvre aimée.

Et pourtant…
Dès les premiers séminaires que je donnais à Sciences Po (il y a plus de dix ans maintenant !), quelle joie !  
Voir les yeux de mes étudiants briller en s’ouvrant à des œuvres comme le Sacre du Printemps de Stravinsky ou la Pastorale de Beethoven.

Ou à la fin d’un concert-lecture où je joue et présente des œuvres comme dans mon programme Violon+, des spectateurs aux Flâneries musicales de Reims venant me dirent qu’ils ont l’impression d’entendre « mieux » ! 





Alors, aujourd’hui j’aimerais vous parler de deux musiciens que je fréquente assidûment en ce moment, deux exemples extraordinaires de « musiciens qui parlent » !

Le premier est un immense chef, compositeur, pianiste américain. Je vous en parlais déjà la semaine dernière dans ma lettre « Who is the boss ? ».
Vous vous souvenez ?

Leonard Bernstein (1918-1990)

Oui, c’est bien lui !
Je vous racontais le grand Lenny prenant justement la parole lors d’un concert à Carnegie Hall pour faire un « disclaimer » avant de diriger le 1er concerto de Brahms avec Glenn Gould en soliste.

Eh bien…j’ai passé les derniers jours avec lui… en réécoutant ses fameuses Lectures à Harvard

The unanswered question

Les lectures à Harvard données par Bernstein sont cultes et un exemple ultime de ce qui peut se faire comme communication sur la musique

Cette série de conférences fut le résultat d’une année passée en résidence sur le campus. Bernstein devait y habiter, y encadrer les travaux de certains étudiants et donc donner un cycle de six conférences publiques.  

A l’automne 1972 Bernstein arriva donc sur place. C’était un « Harvard boy » lui-même – il était à la maison. De plus sa fille était à la même époque, au Radcliffe College, « l’annexe féminine » de Harvard…

Incroyable expérience… il fut si populaire sur le campus qu’il fut désigné « Man of the year » par les étudiants.

Un des aspects les plus fascinants de l’approche de Bernstein, outre son charisme absolu, c’est la dimension interdisciplinaire qu’il insuffla à ses « lectures ».

Un des points d’appui pour créer un système de références pour Bernstein est la linguistique. Il cite régulièrement Noam Chomsky.
Pour résumer rapidement, Il file la métaphore de la musique comme langage en déclinant :

  • phonologie (son)
  • syntaxe (structure)
  • sémantique (signification)

Mais bien sûr, son propos va bien au-delà.

Outre la pertinence et la légitimité de cette métaphore d’un point de vue des théories musicales historiques, Bernstein produit un dénominateur commun d’une puissance extraordinaire et rend l’élaboration de son propos compréhensible, tangible pour tous. Une vraie accessibilité…

"Mademoiselle" Boulanger (1887-1979)

L’autre immense artiste avec laquelle je passe beaucoup de temps en ce moment et dont je veux vous toucher mot, c’est Nadia Boulanger (1887-1979).

Oui, j’ai de drôles de fréquentations…

Nadia Boulanger, cette femme exceptionnelle qui traversa le XXe siècle fut parfois appelée l’autre « mademoiselle » avec Coco Chanel.

Son impact sur le monde musical fut énorme :
compositrice au début de sa vie, elle fit une immense carrière de pédagogue de la musique. Presque tous les compositeurs du XXe passèrent dans sa classe ou lui demandèrent conseil. La liste est infinie d’Igor Stravinsky à Aaron Copland en passant par Astor Piazzolla ou Philip Glass.

Nadia Boulanger mena aussi une carrière étonnante de cheffe d’orchestre, à une époque où diriger des orchestres (essentiellement masculins) était impensable…
Elle fut par exemple la première femme à diriger le Boston Symphony Orchestra ..

Pourquoi je vous parle de la grande Nadia ?

D’abord parce que je suis en train de co-écrire un podcast sur elle pour une Université américaine. Et cette plongée dans des archives d’université américaine est passionnante.

Mais à l’instar de Bernstein, Nadia était une grande communicante sur la musique. Ou plutôt : Bernstein, à l’instar de Nadia Boulanger, devrais-je dire !!

En effet, toute sa vie, elle donna des conférences sur la musique. D’ailleurs dans les années 1937-38 elle fit escale à Harvard pour donner des « lectures » publiques sur les cantates de Bach ou sur les sonates et quatuors de Beethoven.
Pendant la 2e Guerre mondiale, elle enseignera d’ailleurs à temps plein aux Etats-Unis. 

Dernier clin d’oeil, elle eut une relation d’amitié avec Lenny Bernstein, qui, bien plus jeune qu’elle, s’inclinait avec admiration et respect devant Mademoiselle. 
 

j’aurais plein de choses à vous raconter sur la grande Nadia Boulanger et je le ferai dans un prochain article, promis ! 

L'incarnation de la médiation

Pour revenir à mon propos du jour, que ce soit avec Lenny Bernstein ou Nadia Boulanger, ce qui frappe dans ces médiations incarnées, c’est  :

  • la capacité à créer des liens, des résonances à travers l’histoire de la musique et entre les arts.
  • l’inventivité pour créer ces dénominateurs communs, et le maniement virtuose de ce que j’aime appeler l‘art de la métaphore ! 
  • et aussi, cet enthousiasme musical, une musique vécue comme quelque chose d’existentiel.

Comment ne pas être médusé, captivé, emporté par leurs explications ?

A force de « passer du temps » avec eux…

I had a dream…


A quoi ressemblerait une telle conférence de nos jours ? 

Comment arriver à transmettre un discours qui rende des choses parfois complexes – possibles à appréhender par le plus grand nombre – sans jamais dénaturer le propos et l’ambition artistique ? 

Et si on pouvait retrouver ou réinventer cette manière de parler de la musique ?

D’ailleurs l’enjeu, comme dans toute forme de médiation, n’est sans doute pas de faire comprendre mais de rendre sensible, de donner à percevoir !

Je me souviendrai d’ailleurs toujours des mots que me dit la brillante compositrice britannique Rebecca Saunders l’été dernier.

Rebecca Saunders a été la première femme compositrice à recevoir le Ernst von Siemens Preis en 2019 : énorme marque de reconnaissance, on dit parfois que c’est le Prix Nobel de la musique ( prix doté de 250 000 euros ;-).  

Notre rencontre eut lieu à Paris à l’IRCAM, une interview que j’écrivais pour le magazine Transfuge.

Après un long moment d’échange, elle me dit soudain (en anglais):
 » Vous savez, souvent les gens pensent qu’il y a quelque chose à comprendre quand ils entendent une musique. Mais c’est un malentendu. Ce qui compte, c’est la curiosité et l’ouverture à recevoir quelque chose de nouveau.« 

Eh bien, il me semble que l’acte de prendre la parole en tant que musicien, c’est précisément d’aller au bout de la mission de l’interprète, au sens d’être un intermédiaire

La prise de parole sert alors l’objectif qui est de susciter la curiosité chez le public, de provoquer sa disponibilité et par là même, de créer les conditions de réception !

Et vous, qu’en pensez-vous ? 

P.-S.1:  

Suite à de nombreux messages, j’ai décidé de poursuivre l’aventure de l’Atelier – mais à un rythme hebdomadaire !
Si vous voulez me rejoindre, je serai en direct sur Facebook. De 18H à 18H30 les Vendredi ! 

En plus, du Facebook Live, les épisodes sont aussi disponibles en replay.

P.-S.2:

J’espère que vous et vos proches vous portez bien, que le déconfinement apporte prudemment l’oxygène, dont nous avons tous tant besoin !

 

Très affectueusement,

Marina 🎻

🎬 

  • Cet article vous a plu ?

Partagez-le 😃

  • Vous avez des réactions ? 

Parlons-en dans les commentaires du blog ! Je les lis tous ! ✍️
ou
écrivez-moi à : info@marina-chiche.com 
 

  • On vous a fait suivre l’e-mail et vous voulez vous inscrire, c’est 👉 ici 

#48 – Who is the boss ?

#48 - Who is the boss ?
Une histoire de chef d'orchestre, de soliste et de...diplomatie !

✍️Quelques liens d’interview

ITW France Musique Musique Matin : j’étais l’invitée de la Matinale pour parler de l’Atelier sur Facebook et de la musique sur les supports numériques !
La Provence  « Ma vie confinée » 

Chers amis,

Hier au menu de mon Atelier sur Facebook, le Concerto de Brahms pour violon et orchestre.  

J’expliquais la nécessité pour un soliste de construire son interprétation d’une œuvre concertante à partir du « score » pour élaborer un discours cohérent, un peu comme acteur de théâtre se devait de connaître l’intégralité d’un texte, connaitre toutes les répliques…

(Le « score« , aussi appelé le « conducteur » en français, c’est la partition qu’utilise le chef d’orchestre, partition où sont écrites toutes les parties, aussi bien celle du soliste que celles des instruments de l’orchestre). 

… lorsqu’une participante m’a demandé dans le « chat », qui du chef ou du soliste décidait d’une interprétation

Question vertigineuse !
Effectivement la relation de travail chef-soliste est très complexe  et sans doute un modèle « managérial » assez exceptionnel de collaboration (réussie …ou pas) !

La rencontre entre un chef et un soliste

Pour une session avec orchestre, un des premiers rendez-vous du planning du soliste est souvent la rencontre avec le chef d’orchestre.
En général assez informelle, cette rencontre permet de faire connaissance, si on ne se connait pas encore et de créer les bases de la collaboration musicale.

Il s’agit de se mettre d’accord autour de la partition : choix de tempi, décisions pour certains « coins », les virages, passages charnières de l’œuvre.

Souvent on joue soit la pièce en entier soit on isole des passages un peu plus problématiques, repérés par expérience. 

Ce moment ressemble sans doute à la lecture d’un script à la table par des acteurs.

Pendant que le soliste joue l’œuvre (seul ou avec un pianiste qui joue une réduction de l’accompagnement d’orchestre au piano),le chef bat la mesure :  il dirige « dans le vide ».

Le paradoxe du chef d'orchestre

Cela pourrait paraitre assez absurde vu de l’extérieur. Un peu comme de l’« air guitar». 

 

Dans ces moments, on prend bien conscience du paradoxe du chef d’orchestre : à la fois la vanité de son rôle et son importance absolue.

Le chef d’orchestre ne produit effectivement pas de son par lui-même
(même si certains chantonnent ou produisent des bruits gutturaux incontrôlés !
mais ca, c’est une autre histoire 😉).

Pourtant lors de ce genre de session, on réalise tout de suite si on n’est pas d’accord ou si quelque chose n’est pas clair dans la compréhension mutuelle. De la communication non-verbale pure !
Fascinant !

"Accompagner" un soliste

Le rôle d’accompagnateur pour un chef est un art particulièrement délicat. On pense souvent que le grand chef d’orchestre sera reconnu uniquement dans la symphonie qu’il dirigera seul.

Mais l’art d’accompagner ou de suivre un soliste demande des qualités incroyables d’empathie, d’anticipation musicale et de réactivité technique.

Non seulement il s’agit pour le chef d’arriver à prévoir ce que le soliste induit dans son interprétation (en espérant que la proposition soit suffisamment « organique », logique ou, au moins, cohérente) mais aussi d’arriver à le transmettre aussitôt par une gestuelle claire et facilement lisible aux musiciens d’orchestre.

Dans certaines œuvres, accompagner un soliste instrumental n’est pas forcément plus simple que de suivre un chanteur à l’Opéra.

Un grand spécialiste du genre est le grand chef indien Zubin Mehta. Parfois la main placée sur la hanche gauche, il se tourne vers le soliste.

 

J’ai d’ailleurs eu l’occasion de prendre conscience de la difficulté de l’exercice lors de l’académie de direction à Pärnu, Estonie dans le festival de Paavo Järvi.

Paavo m’avait invitée à jouer le concerto de Tchaikovsky.
Lors des sessions de cours pour les jeunes chefs, tour à tour Paavo Järvi, Neeme Järvi ou Leonid Grin venaient interrompre les chefs et leur donner des conseils.





Parfois, ils prenaient le relai et montraient aux élèves comment faire.
Rien que par le regard Paavo arrivait à influencer la transmission d’informations à l’orchestre.



Collaborations historiques

La qualité d’interaction entre soliste et chef d’orchestre est un vaste sujet.

On peut citer quelques cas célèbres avec le modelage tel un Pygmalion d’Anne-Sophie Mutter, alors jeune violoniste par le chef allemand Herbert von Karajan.

A l’opposé, la collaboration entre Anne-Sophie Mutter et le chef roumain Sergiu Celibidache tournera court dès la première répétition, sous forme de règlement de compte liée à l’inimitié entre les deux chefs d’ailleurs.





Le chef américain Lorin Maazel était impitoyable sur le moindre « débordement » injustifié d’un soliste : c’est-à-dire que si le soliste voulait prendre des libertés qui ne se justifiaient que sur un « ressenti » (Vous savez le : “Parce que je le sens comme ca”) et ne semblaient donc pas convaincantes au maestro, il rendait – par sa battue – la chose tout simplement impossible et recadrait tout de suite le propos musical. 

Les "stratégies"

En tant qu’interprète, il existe plusieurs « écoles » (ou stratégies):

  • Il y a ceux qui ferment les yeux, mettre leurs œillères et foncent. Ils déroulent leur interprétation et assurent leur partie.
    En gros, c’est « Catch me if you can » ou « Qui m’aime me suive ».
     
  • D’autres cherchent à se fondre avec l’orchestre et vont à tout prix au contact, en mode plus extraverti. Quitte à se mettre en danger, ou à finir très loin de leur propre vision de l’oeuvre.
     
  • Sans doute, l’idéal réside dans une troisième voie, où de la rencontre du soliste avec le chef et l’orchestre nait une collaboration et l’élaboration d’une vision commune de l’oeuvre

La meilleure garantie pour arriver à un terrain d’entente passe au préalable par un souci d’organicité dans les choix musicaux.

Quand la cohérence est évidente, souvent cela résout bien des problèmes et enlève de nombreux points de discussion.

Pour le soliste, reste alors à trouver un équilibre entre être ouvert et garder son centre.

But... who is the boss ?
Bernstein versus Gould

En répondant hier lors de l’Atelier, j’ai repensé à cet extrait fameux du grand chef d’orchestre américain Leonard Bernstein et du non moins fameux pianiste canadien Glenn Gould

Jouant ensemble le Concerto nr.1 de Brahms avec le New York Philharmonic au Carnegie Hall en 1962, Bernstein prit la parole avant le début du concert. 

Après avoir rassuré le public que Mr Gould n’annulerait pas le concert, il délivra un des speeches les plus célèbres du genre.

Voilà ce que Lenny Bernstein dit au début – avec son humour et son éloquence irrésistibles :

 » I can not say I am in total agreement with Mr Gould’s conception.  » (euphémisme…)

Puis :
 » This raises the question : What am I doing conducting it ? » 

Pour dire enfin :  » Who is the boss ? The soloist or the conductor ? »

Je vous laisse écouter cela !
Voilà une mine d’or à méditer en matière de leadership !

Bernstein & Gould – Brahms Concerto nr.1 / Carnegie Hall, NY 1962

De la diplomatie entre musiciens

Pour finir, il faut dire que cette problématique est vraie aussi pour d’autres constellations musicales comme la musique de chambre

Je vous signale encore un cas fascinant avec notre usual Suspect : Mr. Gould, … who did it again !

Cette fois-ci c’est au tour de Sir Yehudi Menuhin de faire un « disclaimer » avant de jouer ! 

Menuhin & Gould dans la 10e sonate de Beethoven

Plus stoique et laconique que Bernstein, Menuhin l’américain gentleman, qui mérite bien son titre de « Sir », se dit « grateful » (reconnaissant) de cette enrichissante collaboration…

Je ne sais pas vous, mais moi, j’y vois autre chose… 😉 

Vous ne trouvez pas ? 

P.-S. :   

Si vous voulez me rejoindre, je suis en direct sur Facebook. De 18H à 18H30 , jusqu’à Vendredi ! 

En plus, du Facebook Live, les épisodes sont aussi disponibles en replay.

J’espère que vous et vos proches vous portez bien en ces premiers jours de déconfinement prudent.
Prenez soin de vous !

 

Très affectueusement,

Marina 🎻

🎬 

  • Cet article vous a plu ?

Partagez-le 😃

  • Vous avez des réactions ? 

Parlons-en dans les commentaires du blog ! Je les lis tous ! ✍️
ou
écrivez-moi à : info@marina-chiche.com 
 

  • On vous a fait suivre l’e-mail et vous voulez vous inscrire, c’est 👉 ici 
JB Urbain

Matinale de France Musique

Ce matin j’étais l’invitée de Musique Matin à la maison de J.B. Urbain sur France Musique pour parler de :
– mon Atelier de musique sur ma page Facebook (de 18H à 18H30 en live et disponible en replay)
– de musique en temps de COVID-19
– de l’envie de faire résonner des lieux de concerts
– des possibilités de médiation, éducation et transmission pour la musique sur les différents supports numériques.

En replay 👉 ici

#47 – Dessine-moi une fenêtre

#47 - Dessine-moi une fenêtre
Une histoire de remerciements, d'atelier et de ...conte oriental !

Chers amis,
 

Cette semaine, je partage avec vous un extrait du texte que Vanity Fair m’a demandé d’écrire sur mon confinement car en l’écrivant, j’ai pensé fort à vous tous, lecteurs de cette lettre musicale hebdomadaire.

Je voulais ainsi vous renouveler mes remerciements pour vos messages chaleureux, cette résonance que vous donnez et qui m’apporte tant d’énergie et de réconfort dans cette période si complexe pour nous tous… 

" Pendant ce temps-là …"

Les premiers échos médiatiques de Wuhan fin Décembre, je m’en souviens très bien, pour la raison simple, que l’orchestre de Wuhan m’avait invitée à venir jouer en soliste en Octobre dernier.

 

Mais c’est seulement le 1er Mars que je commence à réaliser vraiment : le concert de lancement de mon nouveau disque, prévu le 3 Mars, est annulé pour des mesures préventives. Grosse déception, cela fait des mois que je travaille sur l’événement. Heureusement on nous laisse utiliser la salle et avec mon pianiste, nous organisons en dernière minute un live-streaming depuis la salle sur ma page Facebook. Cela se transforme en joyeuse fête musicale, connectée et interactive !

 

Mais voilà, c’était le temps d’avant. En y repensant, nous étions encore innocents et incrédules.  Impossible de prendre la mesure du tsunami qui attendait le monde. Qui eut-cru que donner un concert dans une salle semblerait aujourd’hui si inaccessible ? Que le streaming depuis chez soi deviendrait la norme ?

 

A partir du confinement mi-Mars, un besoin de silence s’est imposé à moi pour encaisser le coup, comprendre ce qui était en train de se passer. Il y avait beaucoup d’ambivalence dans ce silence : parfois serein comme pour une période sabbatique que je désirais prendre sans pouvoir le faire depuis longtemps, une retraite un peu méditative. Mais aussi un temps long traversé parfois par une angoisse sourde. Un faux silence qui n’arrive pas à masquer le bruit incessant des urgences débordées, savoir les médecins au front, angoisse de la maladie et de la mort qui rôdent, la violence de ce confinement pour tant de personnes « mal » confinées et la complexité politique à l’échelle nationale, européenne et mondiale.
Et puis les annulations de concerts successives : quel avenir pour nous, les intermittents du spectacle ? Tout cela mêlé avec la sensation d’une impuissance profonde : à quoi sert la musique dans un temps de crise ?

 

Heureusement je me réchauffe le coeur lors d’apéros-skype. Avec mes amis, nous avons des discussions politiques passionnées, et dans le  groupe WhatsApp un des membres nous lit chaque soir une poésie. De temps en temps, j’y dépose de temps en temps un lien musical, une musique-médicament.

 

Et puis, il y a un tournant. L’association Musique et Santé me demande de faire une vidéo musicale pour les soignants. Grâce à cette association, j’avais pu aller jouer à l’Hôpital Trousseau à l’automne, cela avait été magique. Grâce à cette demande de l’extérieur,  je retrouve le chemin vers ma vocation.
Suite à la vidéo et à mes newsletters hebdomadaires, où je suggère des musiques qui font du bien à l’âme, je reçois tant de messages chaleureux que je comprends enfin que c’est précisément cela ma contribution dans ce temps de crise. Une contribution certes modeste, qui peut sembler futile mais c’est celle-là que je peux apporter… (la suite ici)

 

L'atelier

Depuis Mercredi dernier, j’ai donc commencé un atelier quotidien sur ma page Facebook que j’ai voulu comme une fenêtre ouverte

On a tant  besoin d’horizon, d’imaginaire, d’ouverture…
Alors, j’ouvre les portes de ma salle de travail. 
On y parle de musique, d’histoire de la musique, d’histoires sur la musique. 

La première séquence porte sur JS Bach et les Sonates et Partitas pour violon seul.
Dans les précédents épisodes, on a parlé de :

  • rhétorique musicale
  • de structures,
  • d’archets et violons baroques
  • de « sources » théoriques et historiques. 

J’ai pioché dans ma bibliothèque pour lire des extraits de ces « sources » musicologiques ou littéraires qui m’inspirent, que ce soit des textes de Nikolaus Harnoncourt ou Joachim QuantzLeopold Mozart (le père de Wolfgang), Hermann Hesse ou Umberto Eco.

 

 

Hier, pour préparer la Chaconne de la 2e Partita de JS Bach, nous avons parlé de la Passacaille de Biber.

Je vous l’offre ici comme une méditation musicale pour cultiver un silence intérieur.

Biber Passacaille par Marina Chiche

Dessine-moi une fenêtre...

Ce besoin d’ouvrir une fenêtre m’a fait penser à la magnifique « nouvelle orientale » de Marguerite Yourcenar intitulée 
« Comment Wang-Fô fut sauvé… »

(je recopie d’un site)
Dans l’empire de Han, deux hommes, Wang-Fo un vieux maître en peinture et Ling, son disciple, parcourent les routes. 
Tous les deux se sont rencontrés un soir, dans une taverne et depuis que la femme de Ling s’est suicidée, ils vagabondent ensemble, cherchant à peindre différents paysages.

Mais un jour, Ling et Wang-Fo se font arrêter par les gardes de l’empereur et sont conduit dans son palais. 

L’empereur accuse Wang-Fo de l’avoir trompé sur le monde réel, car son royaume n’est pas aussi parfait que les paysages peints par Wang-Fo et qu’il a eu une énorme déception en découvrant la réalité.
L’empereur, pour le punir, décide de lui couper les mains. Ling se jette alors sur lui pour le tuer mais les gardes s’emparent de lui et le décapite.

L’empereur donne un ordre à Wang-Fo : avant de se faire couper les mains, Wang-Fo doit terminer une toile qu’il avait commencé il y a longtemps et qu’il n’avait pas pris le temps de finir.

Le peintre se met alors au travail. Mais pendant qu’il peint, la mer et la barque qu’il venait de dessiner sur la toile prennent vie. La mer envahit le palais et Ling, dans la barque, fait monter Wang-Fo dedans et tous deux s’enfuient.

 

Si vous voulez me rejoindre, je serai à ma fenêtre tous les jours de 18H à 18H30 ! 

En plus, du Facebook Live, les épisodes sont aussi disponibles en replay.

Un moment partagé pour cultiver ensemble notre jardin musical et pour s’évader… 

 

 

P.-S. :   

J’espère que vous et vos proches vous portez bien et tenez bon…
Prenez soin de vous !

 

Très affectueusement,

Marina 🎻

🎬 

  • Cet article vous a plu ?

Partagez-le 😃

  • Vous avez des réactions ? 

Parlons-en dans les commentaires du blog ! Je les lis tous ! ✍️
ou
écrivez-moi à : info@marina-chiche.com 
 

  • On vous a fait suivre l’e-mail et vous voulez vous inscrire, c’est 👉 ici 

#46 – La résonance – Echo, où est-tu ?

#46 - La résonance - Echo, où es-tu ?
Une histoire de réverbération, de nymphe grecque...et de colibri !

🗓Nouvelle vidéo

🎶🎥 Le week-end dernier, j’ai enregistré une nouvelle vidéo pour l’association Musique et santé grâce à laquelle j’ai pu aller jouer à l’Hôpital Trousseau à l’automne dernier. #MerciAuxSoignants

Likez, partagez, abonnez-vous à la chaîne YouTube de l’association. Cela les aide dans la poursuite de leurs actions ! 
♥️

Chers amis,
 

Cette semaine, dans un moment de méditation, je me demandais ce qui me manquait le plus en tant que concertiste dans cette période de confinement .

Bien sûr, il y a 

  • l’anticipation du concert, 
  • l’adrénaline de la scène,
  • la joie de partager la musique avec d’autres musiciens,
  • celle de présenter les oeuvres que l’on aime et que l’on a préparées,
  • le contact direct avec le public dont on percoit les modulations de l’attention, comme par un sixIème sens, même si on joue les yeux fermés…


La liste est longue…et ces choses me semblent si lointaines déjà.

Pourtant malgré la sensation d’être parfois isolés et empêchés dans notre expression de musicien, puisque nos terrains de jeu ne nous sont plus accessibles, il y a une forte sensation de connexion et la musique classique semble jouer un rôle important dans cette période si particulière. 

Réverbération digitale

Il semblerait même que les contenus internet n’aient jamais été autant consultés. Par exemple, France Musique a posté sur sa page Facebook une vidéo de notre passage dans l’émission Génération France Musique, le Live de Février dernier avec Aurélien Pontier.

 

Il s’agissait du Schön Rosmarin de Fritz Kreisler que je partageais avec vous dans ma lettre sur la valse la semaine dernière et que nous avons enregistré dans notre album Post-scriptum
En 1 journée, 10 000 vues… depuis, plus de 30 k, 1,5k et 50 commentaires…
Des chiffres étonnants pour du classique !!

 

Bien sûr, cela nous a fait chaud au coeur de savoir que cette musique était largement diffusée, et donc continuait de se partager ! 
Mais soyons honnêtes, certaines choses sont difficilement remplaçables par le digital, en tout cas, pour l’instant. Elles se laissent difficilement « dématérialiser ».

Les résonances nécessaires

Parmi ces choses, ce qui me semble le plus difficle à recréer, c’est l’aspect physique de la transmission de la musique, l’aspect physique de l’onde vibratoire … de sa propagation dans l’air 

Car il y a quelque chose de physique dans la diffusion de la musique… 

Cet aspect est fascinant…

Clin d’oeil musical : Il existe, en physique, un phénomène appelé « résonance de Schumann » qui concerne les ondes électro-magnétiques…

Je vous en propose une version musicale… avec effet magnétique garanti 

=> attention ! A n’écouter que si vous avez le coeur bien accroché…ou que vous soignez la mélancolie par la mélancolie 😉
A chacun ses remèdes musicaux !

La mise en vibration

Ce que chaque musicien cherche sans doute, c’est à mettre en vibration : soi-même, l’instrument, le lieu dans lequel on joue… 

On pourrait dire que l’on recherche de l’écho – à tous les sens du terme.Par exemple il y a un terme que j’adore, c’est celui de résonance sympathique. On l’utilise notamment pour désigner des cordes à vide qui se mettent à vibrer « par ricochet » on pourrait dire…
Ainsi lorsque je joue un LA sur la corde de Ré, s’il est très juste, ma corde de LA à vide, à côté va se mettre en vibration ! Magique…
 

La résonance recherchée, c’est aussi celle des lieux. On joue son instrument, mais on « joue » aussi la salle.
Parfois, la durée de la réverbération peut être même trop longue. Dans certaines églises, le discours musical en devient inaudible. 

Relation espace et le temps

Il existe un vrai impact musical de ces paramètres. Selon le lieu où la musique est jouée et donc selon son acoustique, le tempo devra être adapté. 
C’est un aspect interprétatif dont Sergiu Celibidache, l’un des plus grands chefs du XXe siècle était maître.

Parsifal – Wagner Celibidache / Münchner Philharmoniker

D’ailleurs dans Parsifal, Gurnemanz ne dit-il pas : « Zum Raum wird hier die Zeit ».

 

Ici le temps devient espace…

 

Alors, dans cette distension de la temporalité provoquée par le confinement, où sont les espaces à faire sonner, résonner ?
Comme dans la mythologie grecque, sans Echo, il ne reste que Narcisse…
Alors, nous devons peut-être nous replier dans la grotte de l’intime, où la nymphe Echo s’est réfugiée, investir ce nouveau lieu où créer une nouvelle forme de résonance.

 
Car sans doute, l’écho ultime que l’on cherche à faire vibrer, est peut-être autre part… dans l’espace intérieur, dans le coeur de chacun ?

La goutte du musicien

Pour finir, j’aimerais partager avec vous une jolie histoire qu’un ami m’a rappelé récemment. 

L’histoire du colibri

Je cite de ce site

il s’agit d’une légende amérindienne, racontée par Pierre Rabhi :

Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! « 

Et le colibri lui répondit : « Je le sais, mais je fais ma part. »

 

Alors, après ces quelques semaines de silence, j’ai essayé d’apporter modestement quelques gouttes musicales à l’association Musique et Santé 

et je vous propose de se retrouver sur ma page Facebook pour un Facebook Live de 18h à 18h30 à partir d’aujourd’hui.

Ce sera un moment « Dans l’atelier de Marina »pour continuer de créer des échos et des résonances entre nous !

P.-S. :   

J’espère que vous et vos proches vous portez bien et tenez bon…
Prenez soin de vous !

Très affectueusement,

Marina 🎻

🎬 

  • Cet article vous a plu ?

Partagez-le 😃

  • Vous avez des réactions ? 

Parlons-en dans les commentaires du blog ! Je les lis tous ! ✍️
ou
écrivez-moi à : info@marina-chiche.com 
 

  • On vous a fait suivre l’e-mail et vous voulez vous inscrire, c’est 👉 ici 

#45 – Valse qui rit, valse qui pleure

#45 - Valse qui rit, valse qui pleure
Une histoire de Sehnsucht, de conte persan et de ... danse !

🗓Quelques liens en replay

🎶Playlist sur Apple Music « Mélodies sans parole » : Post-scriptum 💽 

📻 Emissions et itw sur le CD Post-scriptum à podcaster, enregistrées juste avant le confinement  :

Chers amis,
 

Cette semaine je voulais partager avec vous une vidéo que j’ai enregistrée pour les soignants à l’initiative de l’association Musique et Santé …ainsi que quelques pensées adjacentes.

Musique et Santé, c’est cette merveilleuse association qui fait un travail remarquable et grâce à laquelle j’ai pu aller jouer dans les services de l’Hôpital Trousseau à l’automne dernier : une expérience magique, qui m’a profondément touchée. Je vous en reparlerai plus longuement dans un prochain article.

Sehnsucht

En réfléchissant à quelle pièce enregistrer, j’ai pensé à plusieurs œuvres de JS Bach, mais je n’étais pas sûre… De si belles œuvres me semblaient rajouter une gravité à une situation déjà objectivement si lourde… 
Quand soudain m’est apparue cette valse de Kreisler « Liebesleid ».
(Vous savez à quel point j’adore ce violoniste et ses pièces…)

Je me suis dit que c’était de ce type de musique dont le personnel soignant avait besoin…
Quelque chose qui vienne alléger, qui apporte du réconfort
Quelque chose de profondément sentimental, qui laisse la place aux souvenirs ou à l’anticipation de jours plus heureux

Quelque chose qui exprime la Sehnsucht…Vous savez, ce terme allemand impossible à traduire.
Une nostalgie de quelque chose dont on se souvient mais que l’on n’a sans doute jamais vécu, ou même le souvenir « par anticipation » d’une chose à venir ou rêvée !

Cela aussi passera

Dans toute sa légèreté, il y a quelque chose de la résilience dans cette musique qui parle d’un chagrin d’amour. (Liebesleid)

Peut-être même une forme de sagesse qui vient nous dire comme le fameux conte persan « This too shall pass ». 

Vous vous souvenez ?

(je recopie de ce site)

Un roi vivant jadis dans un pays du Moyen-Orient était continuellement déchiré entre le bonheur et le découragement. La moindre petite chose le contrariait beaucoup ou provoquait chez lui une réaction vive et sa félicité se transformait vite en déception et désespoir. Vint un temps où le roi en eut finalement assez de lui et de la vie. Il commença à se mettre en quête d’un moyen de s’en sortir.

Il envoya quérir un sage qui vivait dans son royaume et que l’on disait illuminé. Lorsque le sage arriva à la cour, le roi lui dit : « Je veux être comme toi. Peux-tu me donner quelque chose qui m’apportera l’équilibre, la sérénité et la sagesse ? Je suis prêt à payer n’importe quel prix. »

Le sage répondit ainsi au roi : « Je peux peut-être vous aider. Mais le prix à payer est si grand que votre royaume tout entier ne suffirait pas. Par conséquent, ce sera un cadeau que je vous ferai, si vous voulez bien l’honorer. » Le roi lui donna sa parole et le sage partit.

Quelques semaines plus tard, le vieux sage revint et tendit un coffret en jade sculpté au roi. Après avoir ouvert le coffret, le roi y trouva un simple anneau d’or. A l’intérieur de l’anneau, il y avait une inscription, qui disait : « Cela aussi passera. » « Quelle est la signification de cette inscription ? » demanda le roi. « Portez cet anneau en tout temps, lui répondit le sage. Quoi qu’il arrive, avant de qualifier les choses de bonnes ou de mauvaises, touchez l’anneau et lisez-en l’inscription. Ainsi vous serez toujours en paix. »

Une philosophie si difficile à appliquer en ce moment, alors que la réalité prend des formes parfois tragiques…

La valse

Par association d’idées, il est fascinant de voir que les valses trouvent leur place dans l’histoire de la musique, et peuvent exprimer le tragique, intime ou collectif. Elles peuvent exprimer une vraie ambivalence

Que ce soit Chopin…

Chopin Valse en Do# mineur par Dinu Lipatti

Maurice Ravel en 1919-1920

La valse de Ravel Pierre Dervaux – Orchestre des Concerts Colonne

Ou même Jacques Brel en 1959

Jacques Brel – la Valse à mille temps 

Alors, pour finir sur un sourire malgré tout, je vous propose une autre Valse de mon cher Fritz Kreisler.
C’est une vidéo que France Musique a postée ce matin sur sa page Facebook : Schön Rosmarin.
C’était fin Février dernier dans l’émission Génération France Musique le Live

Marina Chiche & Aurélien Pontier – Schön Rosmarin de Fritz Kreisler – captation France Musique Générations France Musique le Live 29.02.2020 

Peut-être que le rôle de la musique en ce moment est avant tout d’être un antalgique qui console nos âmes, qui nous fait rire ou pleurer et qui nous fait l’espace d’un instant oublier, nous souvenir ou espérer ? 

P.-S. :   

J’espère que vous et vos proches vous portez bien…
Prenez soin de vous !

 

Très affectueusement,

Marina 🎻

🎬 

  • Cet article vous a plu ?

Partagez-le 😃

  • Vous avez des réactions ? 

Parlons-en dans les commentaires du blog ! Je les lis tous ! ✍️
ou
écrivez-moi à : info@marina-chiche.com 
 

  • On vous a fait suivre l’e-mail et vous voulez vous inscrire, c’est 👉 ici